Camp
d'été à la PIERRE SAINT MARTIN ANNEE 2002
Présentation
et objectifs du camp 2002
Les
recherches et résultats
La
coloration
Et
après
Photos
retour
La section spéléo de la MJC de Rodez émigre chaque
année, vers les hauteurs des Pyrénées, sur le massif
de la Pierre St Martin ; le camp est organisé depuis 1987 avec
les collègues de l'Alpina de Millau et du GAES de Bilbao.
L'interclub s'intéresse
à un secteur situé en Espagne sur les vastes zones de Zampory
et du fossé d'Analarra qui font parties d'un bassin hydrogéologique
appelé St Georges Nord. La principale découverte de notre
groupe a été réalisée dans le gouffre AN8
(-810).
Nous publions ci-dessous quelques
extraits du compte rendu du camp 2002
Pour en savoir plus sur ce
massif prestigieux, il est vivement conseillé de visiter le site
(http://arsip.free.fr)
de l'ARSIP (Association pour la Recherche Spéléologique
Internationale à la Pierre St Martin).
Vous trouverez, (entre autre) un historique des explorations, les dernières
nouvelles, des photos, une synthèse topo numérisée
de tous les réseaux du massif soit 184500 m de galeries
Présentation et objectifs du camp
2002
Il y a 10 ans, début
1992, le réseau Saint Georges Nord n'était connu que dans
ses amonts (M413, Système d'Analarra et Tobozzo)
Au printemps de la même année, après de longues années
de désobstruction, le trou souffleur du Larrandaburu, situé
au dessus des résurgences, donne accès à un vaste
réseau de galeries fossiles (baptisé un peu plus tard Aresteliako
Ziloua) ;
Et puis, à partir de 1993 tout s'emballe : d'abord, la poursuite
des investigations dans Aresteliako Ziloua permet de déboucher
dans le collecteur principal de tous les réseaux amonts (rivière
Lakhoura). Parallèlement les collecteurs de l'AN8 et de l'UK4 sont
découverts et enfin le grand aval du M413 est exploré. Ainsi,
plus de 70 km de galeries sont reconnues en quelques années...
Le grand blanc situé à l'ouest du massif s'étant
noirci, on s'est pris alors à rêver à un immense réseau
reliant toutes les cavités de cet ensemble hydrogéologique
Cependant, ces dernières années, les découvertes
stagnent et les terminus des différents réseaux s'avèrent
difficiles à passer
Concernant l'AN8, gouffre qui nous mobilise depuis 1991, deux jonctions
sont espérées : en amont, avec le système d'Analarra
et en aval avec Aresteliako Ziloua. Après les années de
découvertes et de recherches dans le gouffre lui-même, a
succédé, de 1996 à 2001, la recherche d'un accès
direct au maillon manquant amont. Ainsi, de nombreuses prospections ont
eu lieu sur une bande de lapiaz de près de 2 km de long entre la
trémie amont de l'AN8 et la trémie terminale du réseau
d'Analarra, des désobstructions ont été tentées
et de nombreux gouffres ont été revus. Quelques nouvelles
cavités ont été découvertes mais la perle
rare, celle qui descend jusqu'au collecteur inconnu, n'a pas été
rencontrée
Précisons qu'en aval, vers la trémie
terminale d'Arresteliako, le maillon manquant se développe sous
une zone de flysch (sédiment imperméable) ; il existe seulement
quelques pertes au contact des calcaires malheureusement bien obstruées.
Les recherches n'ayant pas abouti à des découvertes intéressantes,
l'idée avait germé, en 2001, de redescendre dans le gouffre
AN 8 pour tenter à nouveau notre chance ; fin juillet, nous rééquipons
donc en pensant à tous les points d'interrogations qui traînaient
dans nos têtes depuis 1995
Concernant le maillon manquant aval, il s'agissait principalement de la
plongée du siphon -801 et du puits non descendu à la côte
-796 dans une branche du fossile du Rongeur-carnassier ; vers le maillon
manquant amont, nous avions en vue des escalades à proximité
du chaos terminal et la désobstruction d'une trémie dans
le réseau fossile supérieur.
Ce rééquipement permettait, enfin, de réaliser une
opération de coloration pour vérifier que la rivière
coulant dans le réseau d'Analarra réapparaissait bien dans
l'AN 8.
Les recherches et résultats
En 3 descentes nous équipons
le gouffre. Les fluo-capteurs sont posés comme prévu le
mardi 6 août à -610 et -800
Le premier de nos objectifs étant la plongée du siphon de
-801, Bernard, et son équipe de porteurs internationaux (4 nationalités
représentées ce jour là !) qui l'accompagne, descendent
dès le mercredi
Malheureusement, malgré diverses tentatives
à cause d'une turbidité persistante de l'eau, le siphon
ne passe pas ; la trémie qui obstrue la galerie fossile adjacente
s'est probablement, elle aussi, effondrée dans le siphon... En
cours de remontée, le jeudi 8 août, vers 20 h, la rivière
apparaît toute verte soit 31 heures après l'injection dans
l'AN51 (amont de la rivière d'Analarra)...
Le deuxième objectif était la descente du puits terminal
(côte -796) d'un des avals de la galerie du Rongeur-Carnassier (non
descendu en 1995 car défendu par un passage étroit) ; le
samedi 9 ce fameux puits (14 m) est descendu mais comme nous le pressentions
un peu, le fond est noyé à la côte -810 ; c'est le
point bas actuel de l'AN8 ! . Il faut vite préciser que ce réseau
est très étroit et la visite n'est pas vraiment conseillée
Le retour de cette exploration est " agrémenté "
d'une (petite) crue (débit de l'ordre de 300 l/s)...
Après quelques jours à attendre que la météo
devienne plus clémente, nous revenons le mardi 13 à -800
pour essayer de shunter la trémie terminale par une galerie latérale
; la désobstruction permet juste de se rendre compte que le conduit
revient dans cette maudite trémie et seul le courant d'air passe...
Lors de cette séance une lucarne, dans une galerie fossile à
-790, est repérée ; supposée vue dans un premier
temps, nous déséquipons jusqu'au bivouac...
Les objectifs vers le maillon manquant aval étant épuisés,
nous nous tournons vers les objectifs du maillon manquant amont
Le mercredi 14, nous tentons une escalade un peu avant la grosse trémie
amont pour voir si un passage existe entre les gros blocs coincés
du plafond ; Là, il semble maintenant qu'il n'y est plus espoir.
Enfin, il restait à voir deux points d'interrogation dans la galerie
fossile qui se développe au-dessus du collecteur amont ; l'accès
avait été préalablement équipé le vendredi
10 et un premier point élucidé : un des regards sur le collecteur
actif ne se voyait pas d'en bas : la descente nous confirme que nous n'étions
pas sur une rivière inconnue mais bien sur la même ! (faut
pas rêver !) ; simplement, contrairement à ce que nous pensions,
la galerie supérieure ne traverse pas mais reste sur la même
rive
Cette descente permet néanmoins de trouver une galerie
mais malheureusement obstruée au bout d'une cinquantaine de mètres.
Et puis, après rééquipement d'une escalade de 10
m, nous accédons à nouveau à la trémie terminale
de ce fossile : celle-ci est très courte et nous avons la chance
d'ouvrir un passage ; hélas, 30 m plus haut, nous butons sur une
nouvelle trémie qui ne laisse aucun espoir. Dommage, car un bon
courant air aspirant passe par-là
A ce moment là, nous avions épuisé tous les objectifs
de recherches
Plusieurs sacs sont remontés de -600 en fin
de camp et le déséquipement est programmé en septembre
Il restait néanmoins le souvenir de la lucarne de -790 et de retour
dans l'Aveyron nous questionnons les participants aux explos de 93
Il s'avère rapidement que cette lucarne n'a pas été
faite ! Elle a probablement était jugée sans intérêt
car au moment de l'exploration de ce secteur, d'autres passages plus évidents
restaient à fouiller...
Qu'à cela ne tienne, il est possible de rattraper le coup en septembre
! ...
Nous rééquipons donc la casa del Trueno le mercredi 4 septembre
et un lancé de corde nous amène rapidement dans la fameuse
lucarne : là, une diaclase remontante mène à une
étroiture horizontale : la désobstruction nous permet seulement
d'apercevoir une galerie de 2 sur 1 filer sur quelques mètres...
Est-ce la suite aval ? Mystère !
Le courant d'air est faible,
mais sachant que c'est parfois trompeur, ce passage, situé au dessus
du siphon terminal, est un bon espoir
Parallèlement aux explorations
dans l'AN8 plusieurs séances de prospections ont eu lieu mais sans
résultats intéressants.
Dans l'AN9, la côte -50
est atteinte au fond d'un nouveau puits de 20 m ; arrêt sur passage
étroit avec toujours un bon courant d'air aspirant ; on se rapproche
néanmoins un peu plus de l'AN8
La coloration
Cette année, les équipements
simultanés de l'AN51 et de l'AN8 offraient la possibilité
de réaliser une coloration pour vérifier que les eaux du
collecteur du système d'Analarra réapparaissaient bien dans
l'AN8.
Préalablement, 3 fluocapteurs ont été posés
dans le collecteur de l'AN8 : 1 à -580, 1 à-620 et 1 à
-790 pour être sûr de ne pas oublier un hypothétique
affluent qui pourrait arriver dans un des chaos
Plus en aval, des fluocapteurs ont été posés dans
la rivière Lakhoura d'Arrestéliako Ziloua et aux résurgences
dans le lac de Kakouétta
Le colorant (3 kg de fluorescéine) a été injecté
le mercredi 7 août vers 13 h à -420m dans la rivière
d'Anialarra (au niveau de l'affluent de l'AN51).
Le passage dans l'AN8 a été
vu à l'il nu, le jeudi 8 à partir de 20 h, par l'équipe
plongée qui se trouvait à ce moment là entre le bivouac
et -610. Il est d'ailleurs resté visible pendant plusieurs heures,
une autre équipe se trouvant au bivouac a même pu goûter
la soupe à la fluo
!
Le temps de passage du colorant entre le point d'injection (alt. 1760
m) et l'AN8 (alt. 1200 m) est d'environ 31 heures pour un trajet à
vol d'oiseau d'environ 4800 m.
En aval de l'AN8, seuls les fluocapteurs placés dans la résurgence
d'Illamina ont été récupérés : comme
prévu, ils sont positifs.
En conclusion, cette coloration
confirme que la rivière d'Analarra et celle de l'AN8 n'en font
qu'une
Reste à savoir, néanmoins, si une partie des
eaux de la rivière du M413 se rajoute entre les 2 réseaux
comme l'a démontré la coloration de 1994. A l'heure actuelle,
celle-ci pose problème car la diffluence ne se constate pas dans
le M413
Une nouvelle coloration est envisagée pour lever
cette incertitude
En aval, la rivière de l'AN8 conflue quelque part sous le cirque
d'Errayze avec les rivières du M413, du Tobozzo et de l'UK4 avant
de réapparaître dans la rivière Lakhoura d'Arrestéliako
Ziloua.
Et après
Malgré les difficultés
d'explorations dues au mauvais temps de cette année, malgré
les déceptions de n'avoir pu trouver une suite, nous avons tous
eu plaisir de voir ou revoir l'AN8 et surtout son fabuleux collecteur
Il ne reste, à priori, qu'un seul espoir de continuation dans le
gouffre, celui du fossile de -790
Si tout le monde s'accorde à
dire qu'il faut retourner voir, chacun sait que la tâche n'est pas
facile
Alors quand ?
en 2003 ?
en 2004 ?
La problématique
est toujours la même pour l'AN8, il faut pouvoir rassembler suffisamment
de personnes pour descendre et remonter la vingtaine de sacs nécessaire
à cette opération...
Cette année, sur l'ensemble des réseaux du Saint Georges
Nord, les seules découvertes notables ont été réalisées
dans les amonts du système d'Analarra où un important réseau
fossile a été rencontré. Celui-ci serait contemporain
du fossile que l'on trouve à -300 dans l'AN8. Ces fossiles ont
été creusés à un moment où la couverture
de flysch recouvrait toute la partie ouest du massif ; les eaux résurgeaient
au nord et ces collecteurs s'écoulaient du sud vers le nord soit
sur un axe perpendiculaire aux écoulements actuels. Ces vieux fossiles
sont souvent recoupés par des réseaux plus récents
qui peuvent, comme les puits des Pulgarcitos de l'AN8, rejoindre les collecteurs
actuels
Cette découverte donne des idées
Concernant l'AN8,
dans la situation actuelle où les possibilités se raréfient,
on peut se demander s'il ne serait pas opportun de tenter de nouvelles
recherches aux terminus des galeries fossiles de -300. Côté
trémie du Phou Dingue de Mendibelza, le courant d'air est très
violent et a d'ailleurs motivé de nombreuses séances de
désobstruction dans les années 80
En toute logique
on peut supposer que le collecteur inconnu est tout proche de là
(peut être une centaine de mètres en dessous !)
A
l'opposé, côté Pulgarcitos, la poursuite de la galerie
au-delà de la trémie pourrait ouvrir une voie, pourquoi
pas, vers le collecteur des Partages
Voilà donc une idée de recherche à méditer
Concernant l'AN9, si la jonction
avec l'AN8 est probable, elle n'est pas certaine
En effet, l'observation
des courants d'air au niveau du réseau -80 de l'AN8, (lieu de jonction
hypothétique) n'indique pas un apport flagrant de courant d'air
Il reste donc quelques espoirs que cette cavité se dirige vers
le maillon manquant, secteur d'ailleurs très proche de la trémie
du Phou Dingue de Mendibelza
Et puis, malgré le sentiment
que nous avons déjà passé beaucoup de temps en prospection,
on ne pourra jamais dire que la perle rare, cette cavité qui descend
jusqu'au collecteur inconnu, n'existe pas
!
|